“L’amour phoque, celui qui fait l’effet d’un shaker, tu te moques mais je sais que tu en rêves en cachette, l’amour phoque, celui de quand tu as dit “fuck l’amour” et pourtant, c’est celui qui te rend si mou.”
L’amour phoque c’est peut-être un peu le contraire de l’amour vache. Même si on qualifie certains phoques de veaux-marins, Aristote lui parle plutôt d’un animal heureux. Après Moi tout seul (2021), un premier EP en solo, Gatien nous parle ici d’amour à travers un bestiaire symbolique
.
C’est un artiste heureux, ou du moins, moins triste, qui s’exprime sur cet album cultivant une naïveté à double-sens, des chansons du quotidien composées avec une guitare et un ordinateur, dans des trains entre Gimont (une ville dont il parle sur ‘Il faut quitter Gimont”), et Paris où il se rend pour retrouver son âme-phoque-soeur.
Navigant entre conscient et inconscient, Gatien signifie son spleen de la campagne et ce n’est pas un hasard s’il rend hommage à Jean-Luc Le Ténia (“Les Otaries”), artiste minimaliste et complet parfois oublié, incarnation de la débrouille et du DIY. Cette filiation et cet état d’esprit sont aussi un clin d'œil à La Souterraine qui continue de faire vivre la musique du chanteur underground avec des compilations hommage régulières (les Mausolée tapes, et les Téniamania).
Quant à L’Amour Phoque, c’est aussi un travail d’équipe: les voix de Julii Sharp et Suzanne Belaubre, la vidéo d’animation d’“On nous ment” signée Neniu, l’accompagnement de Benjamin Caschera, les visuels de l’artiste Amandine Urruty, les arrangements signés par Charles Fourcassié, virtuose et producteur toulousain de bass music, font de ce disque une aventure définitivement collective. Une manière de trancher avec Moi tout seul.
À PROPOS DE GATIEN
C’est dans la profonde ruralité bigourdanne que Gatien réalise ses premiers essais musicaux. Il a 13 ans, vient d’arrêter le football et de se procurer une basse après qu’on lui eut offert Nevermind, de Nirvana, et avec son frère et leurs meilleurs amis ils viennent de créer Distorsion Rural.
Dix ans plus tard, on le retrouve à écumer les rades toulousains dans différentes formations inspirées par Fugazi et les Red Hot Chili Peppers jusqu’à ce que des douleurs aux poignets l’obligent à se tenir éloigné de sa basse. S’ensuit un passage à vide pendant lequel Gatien se persuade que son aventure musicale est derrière lui. L’occasion de poursuivre un autre de ses rêves, celui de devenir plume pour une femme ou un homme politique. Il s’installe dans la campagne gersoise afin de s’y adonner, mais retrouve le soir en cachette ses ami.e.s du collectif The Watt Enterprise avec lesquels il se livre à diverses tentatives vocales.
Au fil de celles-ci, il réalise que le bébé n’avait pas forcément été jeté avec l’eau du bain. Ces tentatives s’accumulent sur des disques durs en même temps qu’il revoit (assez rapidement) à la baisse ses ambitions politiques. Jusqu’à ce que 2020 et ses turpitudes lui offrent une bonne occasion d’y mettre de l’ordre. Il peaufine dans sa chambre des morceaux influencés par les sonorités électroniques de Four Tet et Joe Goddard de Hot Chip que par John Frusciante, Johan Papaconstantino et Manu Chao. Celles-ci donneront son premier EP solo Moi tout seul.